Comme la période d’une onde sinusoïdale, l’écho de l’ailleurs
se rappelle à moi qui suis clouée là, pour encore un moment
(enceinte de 6 mois).
Pourtant au retour des plaines Mongoles comme après avoir parcouru le massif escarpé de ma plus belle île du Cap Vert, un questionnement sur l’utilité de ces voyages m’a assailli.
Le tour du monde pour le tour du monde en famille ne me parait plus avoir de sens. Voir, parcourir, rencontrer durant une année ou plus, n’a de moteur éphémère qu’un certain égoïsme. En se frottant à la réalité des autres, la notion de décence se fait sentir.
Quel est notre contribution au bouleversement de leur équilibre, en nous pavanant sur les chemins du monde, en tant que touriste … même si beaucoup se refusent à être vu comme tel ?
Désert, le cordeau du peintre Brigau
Oh, oui, je sais, c’est un vaste débat, où le sens commun explique que le voyageur/touriste apporte du beurre dans les épinards des agriculteurs et sur les poissons des pêcheurs, qui devraient avoir autant droit au confort que les occidentaux. Mais la planète y résistera-t-elle ?
L’influence inverse vers plus de frugalité et de simplicité
ne serait-elle pas plus salutaire ?
J’avais déjà l’intuition que le mouvement systématique lors d’un voyage générait parfois la dispersion et surtout limitait la dimension relationnelle. En effet, le voyageur gesticulant ne fait que survoler la compréhension des gens et des cultures qu’il croise. Aussi n’ai-je jamais conçu le voyage comme une boulimie de lieux à enchainer dans un minimum de temps. Au contraire, le temps est devenu pour moi un vrai luxe, permettant de mesurer, de construire et d’apprendre, sans pression.
Mais lors de ces difficiles retours à la vie courante, j’ai touché du doigt un certain sens du voyage qui ne se montrait à moi jusque-là qu’en filigrane.
Il est si exaltant de partir à l’aventure, de se laisser porter par la spontanéité du baroudeur mais rien ne remplace l’objet du voyage et la connaissance du contexte. Et puis l’effet thérapeutique de l’itinérance n’est plus pour moi à l’ordre du jour. Le chemin intérieur a besoin de bien moins et de bien plus à la fois.
Il m’importe aujourd’hui soit de transmettre, soit de comprendre, soit d’aider.
* Transmettre, car des enfants se regardant le nombril entre la console et le smartphone auront peu de motivation pour trouver leur propre voie dans la vie. Or vivre la réalité d’enfants de leur âge selon d’autres coutumes ouvre l’esprit, mène à la relativité et permet ensuite de faire ses choix, en connaissance de cause.
* Comprendre, car c’est en partageant le quotidien suffisamment longtemps qu’il est possible de commencer à toucher du doigt les véritables enjeux d’un pays ou d’une situation, imaginé(e) façon carte postal sur le sol européen.
* Aider, parce qu’il est impossible de rester impuissant devant la détresse de personne dont on partage un bout de vie. Ce n’est qu’en utilisant ses compétences pour le bien-être des moins bien lotis que soi que le mot solidarité reprend tous son sens. (Ça sent de plus en plus l’ONG …)
Il faudra mettre à profit mon immobilité assumée
pour monter un projet proche de ces 3 types.
Pourtant l’horizon me fait déjà de l’œil …
Qu’importe la gueule de bois du retour, le souvenir de l’ivresse du départ me rend fébrile comme si j’étais programmée pour ne jamais défaire mes bagages. C’est un peu comme si la sédentarité me flétrissait, comme si je ne me nourrissais pas suffisamment à courir la ville et à ré-imaginer mon avenir sur les rails.
Ma complexité réside dans le juste équilibre
entre nomadisme instinctif et évidence du quotidien.
[…] L’appel de l’horizon …, 21 mai 2012 […]