03 Août 2009
Sud de la Mongolie, Province de Ömnögöv,
Parc national de Gurvan Saikhan
Maudit guide qui nous mène à gravir la plus haute dune de Mongolie, maudit soleil de plomb qui rend chaque pas plus difficile, maudit Ange qui grimpe sans se douter que je ne puisse pas réussir l’opération, maudit sac qui me pèse et qui pourtant ne contient que de l’eau, maudit entêtement à aller jusqu’au bout quoiqu’il en coute …
Le sol se dérobe sous mes pas, le sable glisse par plaque sous ma chaussure, me faisant gravir deux fois le dénivelé de la dune. Mes semelles suivent les traces des précédents, espérant trouver un peu de sable déjà tassé. L’humidité résiduelle est dérisoire (28%), mon nez et ma gorge s’assèchent un peu plus à chaque inspiration.
Quelle méthode adopter ? Monter droit dans la pente, en escalier, zigzaguer pour limiter l’effort mais en faisant plus de chemin. Ne serait-ce pas mieux en retirant mes gros godillots ? Putain de Dune.
Deux braves sont déjà là-haut, au sommet du mur de sable qui suit la cassure. Merde, ils sont drôlement forts.
Les filles derrière se plaignent et souffrent du soleil qui leur grille la peau. Après un bon tier franchi, elles décident de regarder les autres finir. Après tout, elles ont raison, à quoi cela rime-t-il ? Quel orgueil mal placé peut bien pousser certains à en chier autant. C’est tellement absurde que je vais faire de même … m’arrêter !
NON ! C’est trop facile. Où est passée la théorie : repousser ses limites, savoir si le bois dont je me chauffe aujourd’hui est toujours aussi coriace, emporter de magnifiques images. Après tout cela, le panorama du haut de cette dune doit être si merveilleux … Abandonner comme une fille, sans vraiment avoir atteint la corde sensible, sans avoir fleureté avec le point de non retour, pas question !
La cassure forme une petite plate-forme qui me permet de souffler quelques instants. Il ne faut pas trainer, le toulousain est au sommet et Ange est en passe d’arriver. La dernière nana en course a déjà attaqué le mur de sable et notre moustachu de Pau me dépasse.
Quel putain d’entêtement pour n’y gagner que ma propre reconnaissance, alors que je pourrais sagement attendre qu’ils redescendent !
Finalement bien décidée à franchir le mur de sable à mon tour, je laisse le sac sur le chemin et plus légère, je me délecte du plaisir d’enfoncer mes doigts jusqu’au sable frais. Les pieds se placent comme s’il s’agissait de gravir un glacier. Toujours 3 points d’appui. Je maugrée intérieurement, la chaleur m’assomme et je commence à regretter l’eau laissée 7m plus bas.
J’entends leurs voix. Quelques encouragements de la fine équipe commencent à résonner. Si près du but, j’irai jusqu’au bout … Malgré les « conseils » d’Ange, l’ami des steppes descend à ma hauteur et nous montons de concert jusqu’au sommet, alors que le roannais immortalise l’ascension :
–Et en plus elle a le sourire !
YES, what a pleasure to have managed to climb this fucking sand dune …
La vue est tellement étourdissante qu’elle m’en fait perdre mon latin. Sous nos pieds, une bande de verdure où paissent les chevaux et les chameaux, la ligne de crête de la dune se prolonge à l’horizon et de l’autre coté, un désert de sable s’étend comme si la mer était au bout.
Un grand vent de sable complice de ma réussite se lève, mais fait fuir mes compagnons par gigantesques bonds, redescendant en 5min ce qu’ils ont monté en 1h30. Je reste là haut, bien décidée à profiter de mon « exploit » encore quelques minutes. Suffisamment pour que le sable cesse de me fouetter et que je puisse enfin sortir l’appareil photo de sa poche plastique : 360°
La Mongolie m’a envoutée avec ce désert si riche de paysages différents, aride mais recélant de nombreuses plantes et fleurs, sec mais verdoyant dès que coule la plus fine rivière souterraine, peu peuplée mais chaleureuse de ses nomades.
J’essaie de voir aussi loin que le relief me le permette mais mon regard se perd dans l’azur, attiré par l’envie de m’envoler comme les autres
… Un plaisir entier, n’ayant même pas à récupérer mon sac, laissé en route. Merci, tortionnaire.
Au loin un enfant roule dans le sable à s’en étourdir.
C’est le petit gars qui me présentait son cheval ce matin.
Il est pied nu …
J’ai l’impression que chacun décide par lui-même de quel coté de la lucarne se placer … Il suffit de commencer à concrétiser ses aspirations pour que le reste suive souvent.
merci pour cette petite lucarne ouverte sur un monde où j’ai l’impression d’être du mauvais côté…..