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L’expérience virtuelle dont tu es le héros

Quand j’étais môme, j’avais un super pouvoir, sans fumée, sans alcool, sans drogue et sans écran !

Anticiper l’avenir.

Je pouvais vivre toute une gamme de situations, avant d’y être confrontée.

Je n’avais qu’à imaginer une circonstance : j’en inventais chaque détail, je ciselais chaque dialogue, je la vivais dans ma tête.

Vous voyez les gens qui parlent tout seul ?! Et bien, c’est un peu ça.
Ou comme les gamins qui ont un ami imaginaire. Moi j’avais des morceaux de vie imaginaires.

Tantôt l’heureuse amie d’un bande de potes que j’aimais à la folie, tantôt héroïne d’une histoire passionnelle, aventurière autour du monde ou bénévole d’ONG. etc

Souvent, c’était des situations plausibles, que la réalité ne renierait pas. Pas de fantastique, ni de changement d’époque historique.

C’est ainsi que dans la vraie vie, bien jeune, j’avais une expérience de dingue. Jamais déstabilisée par une situation, j’avais les mots, la contenance et la joie de vivre.

Avec ce que je sais aujourd’hui à propos de la Loi de l’Attraction, je me demande un peu si ce n’est pas pour cela que tout me réussissait à l’époque.

Ce que tu penses, tu le deviens.
Ce que tu ressens, tu l’attires.
Ce que tu imagines, tu le crées.

Bouddha

Et puis, naturellement, innocemment, j’ai commencé à rêver à des choses trop très précises qui impliquaient des gens de mon entourage.

Rapidement, il s’est imposé que la réalité ne m’offrait pas exactement les moments imaginés.

C’était même parfois casse-gueule car il m’était parfois difficile de calibrer mon comportement à ce qui était attendu dans la réalité.

Pour ne pas être déçue et puis un peu par superstition, la gamine que j’étais s’est jurée de ne pas vivre, par l’imagination, les moments de la vie qu’elle souhaitait pour l’avenir, afin d’éviter qu’ils ne lui échappent en vrai.

La règle était simple : Ne pas vivre en ‘rêve’, les moments à portée de main.

L’âge aidant et surtout les études me prenant de plus en plus de temps, j’ai petit à petit oublié cette pratique, ce jeu qui remplissait ma vie lorsque j’étais seule.

Pendant de nombreuses années, j’ai oublié.

Jusqu’à ce qu’après quelques temps dans mon premier job à Industrie & Co, je m’effraie du ternissement de mon esprit, comme celui des cols blancs qui se réunissent chaque début de semaine autour de la machine à café pour répondre « Comme un lundi » à la question « Comment ça va ? ».

Alors j’ai cherché ce que j’avais fait de ma fantaisie : Où l’avais-je égarée ? A quel moment m’avait-elle lâchée ?

Au moment où la trépidante et sérieuse réalité avait pris toute la place.

Alors j’ai tenté par petites touches de faire réapparaître la magie de mon imaginaire. Mais pour cela, il faut avoir du temps, seule, du temps à ne rien faire, juste à dialoguer avec les personnages inventés.

Plus tard, enfants obligent, la vie m’a voulue bien présente au réel. Je ne le regrette aucunement car c’est cela ‘vivre vraiment’ : être présente en pleine conscience.

Mais à nouveau, avec les années, je me suis interrogée sur la légèreté disparue, sur le piment de l’extravagance envolé, sur une sorte de timidité réactivée, sur une certaine retenue de ma sensualité aussi.

La rêverie est revenue ponctuellement et m’a aidé à alléger le quotidien, à être un peu plus qu’une femme et une mère.

Depuis une semaine, alors que je fais un grand tri dans tout ce qui encombre le Phare, je mets aussi de l’ordre dans ma tête. Je vis une folle histoire.

En fait, j’ai décidé de faire éclore un épisode que je me refuse d’évoquer depuis des années.

Tout part d’une situation réelle dont la négation et l’économie des mots ne cessent de ré-ouvrir en moi une ancienne plaie.

Mais cette fois, ce n’est pas pour me distraire ou faire jaillir un peu de futilité mais pour épuiser le champ des possibles : ressentir à quel point rien n’aurait pu y faire, ni ce qui n’a pas été fait, ni ce qui n’a pas été dit, ni ce qui n’a pas été vécu.

Le ‘vécu virtuel’ d’un peu de reconnaissance, d’affection, de respect, de communication et d’attention  comble mes besoins et m’offre l’apaisement nécessaire pour laisser derrière moi cette histoire, bien banale.

« Le jour où l’on s’aperçoit que le seul être qui peut vous consoler, c’est celui qui vous a fait du mal »

L’étudiante, Valentine Ezquerra

Hum … mais pourquoi attendre de l’autre qu’il guérisse nos blessures, comble nos besoins ou lui en vouloir s’il ne le fait pas, alors que nous avons en nous toute la ressource nécessaire ?

Ainsi, en plus d’offrir la légèreté et l’expérience, cet imaginaire recèle donc une autre utilité : il permet de dénouer plus facilement la pelote des jugements, des stratégies, des sentiments, des pensées, des besoins et des requêtes, tout en ouvrant les yeux sur la pelote de l’autre.

« J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. »

Alfred de Musset, On ne badine pas avec l’amour (1834)

Peut-être trouverez-vous ces confidences un peu ‘perchées’, bien qu’il ne s’agisse de rien de plus que du prolongement d’un jeu d’enfant bien connu :

« Et si on disait que … »

Oui, lecteur, j’ai bien pensé que cette histoire pouvait être une échappatoire, un refuge après le tremblement de terre qui nous a bouleversés dernièrement.

Et quand bien même … c’est salutaire.
Peut-être un jour pourrais-je travailler sur ce deuil de la même façon.

Au final, plus je grandis et plus je découvre qu’enfant, j’avais des outils efficaces bien qu’instinctifs.

Et puis comment croyez-vous que les auteurs de film ou de livre soient si justes à propos des émotions, des sentiments de leurs personnages, des dialogues de leurs histoires et de la vraisemblance de leurs rebondissements ?

Au plaisir de vous lire.

Published inAu fil des jours...EnfanceEtat d'Ame

3 Comments

  1. bulle bulle

    Si tu as un épisode de ta vie que tu te refuses d’évoquer c’est bien qu’il te pose un réel problème. Si tu es à un moment de ta vie où tu es sereine, c’est le moment de l’aborder , le faire resurgir dans son entier , analyser ce qui t’a posé problème, à tord ou a raison pour que tu puisses enfin le considérer comme tous les autres moments de ta vie sans que ce soit une parenthèse enfouie. Nous avons des vies dans la vie mais je pense qu’il ne faut pas vouloir en écraser une. Elles ont toutes leur importance.

  2. Soir Bulle,

    Voilà nous sommes bien d\’accord, c\’est pourquoi très jeune j\’ai instauré la règle : Ne pas vivre en ‘rêve’, les moments à portée de main.
    Justement pour tendre à les vivre vraiment.
    Nous disons la même chose.

  3. bulle bulle

    Il ne faut pas « vivre en rêve » les moments à portée de main mais faire en sorte que les rêves que l’on peut avoir deviennent vraiment du vécu et si l’on ne tombe pas dans l’utopie, je pense que c’est tout à fait réalisable.

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